La plupart des cantons suisses prélèvent un impôt spécifique sur le bénéfice réalisé lors de la vente d’un bien immobilier. Cet impôt, appelé impôt sur les gains immobiliers (ou impôt sur le bénéfice d’une vente), est dû par les particuliers et les sociétés qui vendent des immeubles faisant partie de leur fortune privée. Bien maîtriser sa logique permet d’anticiper le montant à payer et de savoir quand il est possible de reporter l’imposition en réinvestissant le produit de la vente.
Comment est calculé le bénéfice imposable ?
Le bénéfice imposable correspond à la différence entre le prix de vente et la valeur d’acquisition, corrigée des impenses(dépenses ayant augmenté la valeur du bien) et des frais de transaction. La loi vaudoise, par exemple, définit le gain imposable comme « la différence entre le produit de l’aliénation et le prix d’acquisition augmenté des impenses ». Cette règle se retrouve dans la plupart des cantons : les frais de notaire, de registre foncier, les travaux d’amélioration et les frais de courtage viennent s’ajouter au prix d’achat pour réduire le gain imposable. À l’inverse, le prix de vente peut être minoré des commissions et frais liés à la vente.
Des taux variables selon le canton et la durée de détention
L’impôt sur le bénéfice immobilier est progressif : plus la durée de détention est longue, plus le taux diminue. Chaque canton fixe son barème. Dans le canton de Genève, les ventes rapides (< 2 ans) sont imposées à 50 % du gain, tandis qu’une détention d’au moins 25 ans exonère complètement la vente entre ces extrêmes, les taux dégressifs sont de 40 % dès 2 ans, 30 % dès 4 ans, 20 % dès 6 ans, 15 % dès 8 ans et 10 % dès 10 ans.
Ces barèmes varient fortement d’un canton à l’autre : un même gain sera taxé environ 135 000 CHF dans le canton de Berne après 10 ans et 99 000 CHF après 20 ans pour un bénéfice de 500 000 CHF. À Zurich, des réductions de 5 % du taux s’appliquent après 5 ans, 8 % après 6 ans, 11 % après 7 ans et 50 % après 20 ans de détention. En revanche, dans le canton de Vaud, le taux de base est de 30 % et peut descendre à 7 % après de longues années de détention. L’objectif est d’encourager la détention à long terme et de limiter la spéculation.
Quand peut‑on reporter l’imposition ?
Certains cas permettent de différer l’impôt sur les gains immobiliers (on parle de report ou remploi). Selon l’article 65 LI vaudois, l’imposition est différée notamment lors d’héritage, de donation, de transferts entre conjoints ou d’échanges par remembrement.Le report le plus courant concerne la vente d’un domicile principal suivie de l’achat d’une nouvelle résidence principale en Suisse. Les conditions, précisées sur de nombreux sites spécialisés, sont les suivantes :
- Le vendeur et l’acheteur du bien de remplacement doivent être la même personne
- Le logement vendu et le logement de remplacement doivent avoir servi et servir au propre usage du contribuable (résidence principale)
- Le gain est réinvesti totalement ou partiellement dans l’achat ou la construction du nouveau bien
- Le délai pour réaliser l’achat de remplacement varie selon les cantons : en général deux ans, mais certains cantons l’étendent de un à cinq ans. Genève, le canton accorde jusqu’à cinq ans pour utiliser le produit de la vente et demander le remploi
- Le nouveau logement doit se situer sur le territoire suisse
Lorsque ces conditions sont remplies, l’impôt correspondant à la part du gain réinvestie est différé. Toutefois, si le produit de la vente n’est que partiellement réinvesti, la portion non réinvestie reste imposable En outre, le report n’est pas une exonération définitive : lors de la revente du bien de remplacement, l’impôt différé est dû, en plus de l’impôt sur le nouveau gain. Si la résidence est louée ou cesse d’être la résidence principale, l’impôt différé devient également exigible. Certains cantons permettent d’enchaîner plusieurs remplois successifs, mais la taxation différée finira par s’appliquer lors d’une vente sans réinvestissement.
Exemple de report et calcul simplifié
Un propriétaire genevois vend son appartement et réalise un gain de 300 000 CHF. S’il réinvestit 200 000 CHF dans l’achat d’une maison en remplacement, la partie du gain réinvestie pourra être reportée. En revanche, les 100 000 CHF non réinvestis seront immédiatement taxés. Lors de la revente ultérieure de la maison, le gain différé (200 000 CHF) s’ajoutera au nouveau gain pour le calcul de l’impôt. Cet exemple illustre l’importance de réinvestir une grande partie du bénéfice pour optimiser la fiscalité.
Points clés pour bien gérer l’impôt sur le bénéfice immobilier
- Vérifier le prix d’acquisition : si le prix d’achat n’est plus connu, certains cantons acceptent d’utiliser l’estimation fiscale datant de plus de dix ans comme base
- Déduire toutes les impenses : travaux d’agrandissement, rénovations, frais d’acte et commissions réduisent le bénéfice imposable
- S’informer sur le barème cantonal : les taux et la durée de possession requise varient fortement. Par exemple, à Genève la charge fiscale tombe à zéro après 25 ans
- Anticiper le report : pour bénéficier du remploi, il faut respecter le délai fixé par le canton et déposer une demande auprès des autorités fiscales. À Genève, une demande de révision peut être déposée dans les cinq ans après la vente
- Prévoir la trésorerie : l’impôt sur le gain immobilier est souvent consigné chez le notaire au moment de la vente pour garantir son paiement. Le vendeur doit donc planifier son financement, car la somme immobilisée ne sera restituée qu’après l’installation dans le nouveau logement
Conclusion
L’impôt sur les gains immobiliers en Suisse est un prélèvement significatif qui dépend du canton, de la durée de détention et du montant du gain. Le bénéfice imposable est calculé après déduction des impenses et des frais, puis taxé à un taux dégressif selon le nombre d’années de possession. Dans certains cas, il est possible de reporter l’imposition en investissant rapidement le produit de la vente dans une nouvelle résidence principale. Ce report, souvent limité à deux ans(ou à cinq ans à Genève) et réservé à la fortune privée, permet de différer l’impôt mais pas de l’annuler. Une bonne préparation et l’accompagnement d’un spécialiste sont indispensables pour optimiser son imposition et réussir son projet immobilier.
Article par Katia Cid
Fondatrice de Projesteam et responsable des ventes et locations